Como un niño: sin odio, sin remordimiento

Charles Baudelaire
(Francia, 1821-1867)

Alegoría
Esta es una mujer de rotunda cadera
Que permite en el vino mojar su cabellera.
Las garras del amor, las mismas del granito.
Se ríe de la muerte y la depravación,
Y, a pesar de su fuerte poder de destrucción,
Las dos han respetado hasta ahora, en verdad,
De su cuerpo alto y firme la altiva majestad.

Anda como una diosa y tiende sultana,
Siente por el placer fe mahometana.
Y cuando abre los brazos, sus pechos soberanos
Demanda la mirada de todos los humanos.

Ella sabe, ella sabe, ¡oh doncella infecunda!,
Necesaria, no obstante a la caterva inmunda,
Que la beldad del cuerpo es un sublime don
Que de cualquier infamia asegura el perdón.

Ella ignora el infierno y purgatorio ignora,
Y mirará por eso, cuando le llegue la hora,
La cara de la muerte en un tan duro momento,
Como un niño: sin odio, sin remordimiento.
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C'est une femme belle et de riche encolure,
Qui laisse dans son vin traîner sa chevelure.
Les griffes de l'amour, les poisons du tripot,
Tout glisse et tout s'émousse au granit de sa peau.
Elle rit à la Mort et nargue la Débauche,
Ces monstres dont la main, qui toujours gratte et fauche,
Dans ses jeux destructeurs a pourtant respecté
De ce corps ferme et droit la rude majesté.

Elle marche en déesse et repose en sultane;
Elle a dans le plaisir la foi mahométane,
Et dans ses bras ouverts, que remplissent ses seins,
Elle appelle des yeux la race des humains.
Elle croit, elle sait, cette vierge inféconde
Et pourtant nécessaire à la marche du monde,
Que la beauté du corps est un sublime don
Qui de toute infamie arrache le pardon.

Elle ignore l'Enfer comme le Purgatoire,
Et quand l'heure viendra d'entrer dans la Nuit noire
Elle regardera la face de la Mort,
Ainsi qu'un nouveau-né, - sans haine et sans remords.